Nous mouillons dans la baie de Marigot, sur Terre de Haut, à l’écart du bourg et des dizaines de bateaux sur bouées. L’archipel des Saintes est constitué de deux îles principales habitées : Terre de Haut (au vent = à l’est) et Terre de Bas (sous le vent = à l’ouest). Terre de Haut est l’île la plus touristique, où chaque jour, plusieurs bateaux débarquent des passagers depuis la Guadeloupe « continentale ». Les voiturettes électriques foisonnent sur les petites routes de l’île pour rallier les principaux points d’intérêts touristiques. La rue principale du bourg est jalonnée de boutiques de souvenirs et autres délices des Saintes. L’ambiance se calme après le départ de la dernière navette, comme sur les îles bretonnes.
Dans la baie de Marigot, nous sommes un peu à l’écart de l’agitation. Alors que nous débarquons avec pour projet de monter au fort Napoléon, nous sommes abordés par les gendarmes qui nous informent que le fort va bientôt fermer et nous conseillent une randonnée vers la pointe Morel.
Il fait chaud et nous nous asseyons à l’ombre pour réfléchir à la suite de la journée. Un voisin vient papoter avec nous et nous restons là, à papoter de la pêche, de la métropole, des Saintes, des touristes… Finalement nous nous mettons en chemin vers la pointe Morel à 13h, sous un soleil brûlant. Dès le départ du sentier, nous rencontrons des iguanes communs. Ici, les iguanes des Petites Antilles ont été décimés. Les filles pestent contre la chaleur mais on parvient quand même à la batterie Joséphine qui surplombe la magnifique baie de Pont-Pierre fermée par les roches Percées.
Le soir, nous entendons un bêlement qui ressemble plus à un râle mais nous ne voyons plus rien. Il y a des chèvres partout sur les hauteurs. Le lendemain matin, le bêlement a repris mais plus faiblement. Nous allons voir et effectivement, une chèvre est tombée ! Elle gît dans les rochers et Gaëtan essaye de la relever pour voir si on peut l’aider. Mais elle a visiblement le cou cassé et ses yeux tournent. Il faudrait l’achever parce que plus personne ne peut rien pour elle mais les filles sont terrorisées depuis l’annexe et redoublent de pleurs et de cris quand Gaëtan sort son Opinel. Je demande « tu es sûr de savoir où couper pour que ça ne soit pas une boucherie ? » Cris à nouveau. Je m’éloigne avec l’annexe pour que les filles ne voient plus la chèvre mais re-cris. Tant pis, on va la laisser mourir, elle n’en a plus pour longtemps. Après cette aventure un peu glauque, nous réussissons à visiter le fort Napoléon. De là-haut, nous voyons mieux le mouillage principal. Il ne nous dit vraiment rien, beaucoup trop peuplé.
Nous allons retrouver Dyade à Grand Îlet où nous sommes une poignée de bateaux. L’îlet est désert et les fonds sont jolis et nous passons notre temps dans l’eau.
Terre de Bas est beaucoup plus calme que sa voisine. Il y a très peu de véhicules qui circulent dans la rue principale de Grande Anse bordée de maisons colorées aux jardins fleuris. Nous visitons l’ancienne poterie Fidelin où étaient fabriqués des formes à sucre pour fabriquer les pains de sucre et des pots à mélasse utilisés pour l’affinage du sucre. Il ne reste que quelques vestiges mais nous trouvons plusieurs noix de coco mûres qui font notre bonheur.
Le mouillage devient inconfortable et nous allons à l’anse à Dos, de l’autre coté de l’île. La petite route qui monte pour rejoindre le village de Petite Anse est bordée d’arbres fruitiers : corossoliers, tamariniers, pommes cannelles, courbaril (dont les graines comestibles sont surnommées « caca chien » à cause de l’odeur de leur pulpe). Le village de Petite Anse est niché dans un creux. Depuis la mer, il faut monter, puis redescendre. Il est un peu plus grand que Grande Anse (nous sommes perdus avec les noms ici) et nous trouvons de quoi satisfaire l’envie des filles d’avoir des chocolats pour Pâques qui a lieu le lendemain.
Après notre balade, de retour au bateau, c’est la déconvenue. Dans un carbet au bord de la plage, des jeunes ont installé une table de mixage et des enceintes et maintenant elles crachent leur musique à plein régime. On doit hausser la voix pour parler sur la plage et même au bateau. Il ne reste plus qu’à aller dans l’eau ! Heureusement, ça s’arrête à 21h, nous pouvons espérer dormir. En règle générale, aux Antilles le week-end, nous ne sommes jamais à l’abri de ce genre de fête dont tout le monde « profite ».
Nous retrouvons le catamaran Blue Note à Terre de Haut. Les filles s’étaient rencontrées au Gosier et Yaëlle voulait absolument revoir Anouk avec qui elle s’était très bien entendue. Nous passons un peu de temps avec eux et leur amis : randonnée jusqu’en haut du chameau où Anouk et Flore montrent la cabane qu’elles ont construite lors d’une précédente ascension, chasse aux œufs là-haut, jeux avec le foulard aérien au mouillage, initiation planche à voile… Nous nous séparons une fois de plus en espérant nous revoir avant de partir. Eux sont en route encore 4 ans, ils ne rentrent pas cette année.
Dans le mouillage de Crawen, les bateaux-copains se croisent. Blue Note s’en va, Myrrdin arrive avec deux autres bateaux-copains. L’apéro sur la plage est l’occasion de faire leur connaissance et voilà à nouveau des gens très sympas !
Nous quittons tout ce petit monde le lendemain pour enfin rejoindre l’île de la Guadeloupe. Nous disons au revoir à Myrrdin qui ne font pas la transat retour.
Nous sommes le 24 avril et nous prévoyons de quitter les Antilles début mai. Il n’y a pas de date précise, mais à partir de ce moment, nous pourrons saisir les créneaux météo qui s’offrent à nous pour traverser vers les Açores. Ça va venir vite mais nous ne réalisons pas du tout pour l’instant. Nous avons quand même la vague certitude que nous ne verrons pas vraiment d’autre île aux Antilles après la Guadeloupe. Mais ça ne fait rien, nous sommes plutôt bien ici et de toute façon il est trop tard pour courir ailleurs.